Les mauvais coups se font généralement le 14 juillet ou le 15 août.
C'est encore plus tentant en période de crise majeure, comme
actuellement. C'est sans doute pour cette raison que le Journal officiel
du 13 juillet publie un nouveau décret concernant les associations.
Celui-ci fixe les modalités d'application au niveau national de la condition prévue au premier point de l'article R.141-21 du code de l'environnement,
concernant les associations et fondations souhaitant participer au
débat sur l'environnement dans le cadre de certaines instances.
Pour pouvoir participer, une association devra désormais compter au
moins 2 000 adhérents. Quant aux associations d'utilité publique, elles
devraient exercer leur action sur la moitié des régions au moins, et
disposer d'un minimum de 5 000 donateurs, pour pouvoir se faire
entendre.
Les seuls organismes ayant le droit de le faire entendre leur voix
sur les politiques environnementales sont des organismes publics au sein
desquels seules ces grandes associations ont le droit d'être
représentées. De plus, l'Etat s'octroie le droit de vérifier les
conditions de financement des associations pour s'assurer « de leur
indépendance ».
Les assos les plus gênantes pour les lobbies handicapées
Ce texte est liberticide au regard de la liberté d'association ou
plus précisément du droit des associations à se faire entendre. Il
exclut en particulier toutes les associations d'experts qui ont fait
l'essentiel du travail en termes d'alerte au cours des dernières années.
Mouvement des générations futures – Criirad, Criigen, réseau santé
environnement, Inf'OGM, pour n'en citer que quelques-uns – n'auront aux
termes de ce texte plus le droit de participer, voire plus le droit
d'être agréés puisque c'est l'agrément au titre de l'environnement
lui-même qui est touché par ce décret scélérat.
Autrement dit, non seulement aucun texte de protection des lanceurs
d'alerte n'a jamais été pris par ce gouvernement, du temps de monsieur
Borloo comme a fortiori du temps de madame Kosciusko-Morizet,
mais plus encore, c'est la capacité des associations les plus
dérangeantes pour les lobbies défendus par le gouvernement qui est ici
mise en cause. En effet, sans agrément, la capacité de porter plainte
avec constitution de partie civile reste très réduite. Dans ces
conditions, les procès mettant en cause ces lobbies deviennent beaucoup
plus difficiles.
De la même manière, le fait que les agréments soient conditionnés par
le nombre de personnes rendra très difficile la tâche des associations
locales, constituées contre tel ou tel projet, telle ou telle
infrastructure. Les préfets pourront toujours soutenir qu'elles ne
remplissent pas les conditions.
Ainsi le gouvernement s'est-il attaqué avec efficacité, une fois
encore, aux modestes contre-pouvoirs que notre pays compte encore.
► Référence concernant l'arrêté du 12 juillet 2011 fixant les
modalités d'application au niveau national de la condition prévue au 1°
de l'article R. 141-21 du code de l'environnement concernant les
associations et fondations souhaitant participer au débat sur
l'environnement dans le cadre de certaines instance (JORF n°0161 du 13
juillet 2011, page 12 154).
auteur : Corinne LEPAGE
Ancienne ministre de l'Environnement, aujourd'hui avocate,
présidente de Cap21 et présidente du CRII-GEN et députée au Parlement
européen.
19 juillet 2011
sources : http://www.rue89.com/corinne-lepage/2011/07/19/les-assos-pour-lenvironnement-se-font-entuber-en-douce-214879
C'est encore plus tentant en période de crise majeure, comme
actuellement. C'est sans doute pour cette raison que le Journal officiel
du 13 juillet publie un nouveau décret concernant les associations.
Celui-ci fixe les modalités d'application au niveau national de la condition prévue au premier point de l'article R.141-21 du code de l'environnement,
concernant les associations et fondations souhaitant participer au
débat sur l'environnement dans le cadre de certaines instances.
Pour pouvoir participer, une association devra désormais compter au
moins 2 000 adhérents. Quant aux associations d'utilité publique, elles
devraient exercer leur action sur la moitié des régions au moins, et
disposer d'un minimum de 5 000 donateurs, pour pouvoir se faire
entendre.
Les seuls organismes ayant le droit de le faire entendre leur voix
sur les politiques environnementales sont des organismes publics au sein
desquels seules ces grandes associations ont le droit d'être
représentées. De plus, l'Etat s'octroie le droit de vérifier les
conditions de financement des associations pour s'assurer « de leur
indépendance ».
Les assos les plus gênantes pour les lobbies handicapées
Ce texte est liberticide au regard de la liberté d'association ou
plus précisément du droit des associations à se faire entendre. Il
exclut en particulier toutes les associations d'experts qui ont fait
l'essentiel du travail en termes d'alerte au cours des dernières années.
Mouvement des générations futures – Criirad, Criigen, réseau santé
environnement, Inf'OGM, pour n'en citer que quelques-uns – n'auront aux
termes de ce texte plus le droit de participer, voire plus le droit
d'être agréés puisque c'est l'agrément au titre de l'environnement
lui-même qui est touché par ce décret scélérat.
Autrement dit, non seulement aucun texte de protection des lanceurs
d'alerte n'a jamais été pris par ce gouvernement, du temps de monsieur
Borloo comme a fortiori du temps de madame Kosciusko-Morizet,
mais plus encore, c'est la capacité des associations les plus
dérangeantes pour les lobbies défendus par le gouvernement qui est ici
mise en cause. En effet, sans agrément, la capacité de porter plainte
avec constitution de partie civile reste très réduite. Dans ces
conditions, les procès mettant en cause ces lobbies deviennent beaucoup
plus difficiles.
De la même manière, le fait que les agréments soient conditionnés par
le nombre de personnes rendra très difficile la tâche des associations
locales, constituées contre tel ou tel projet, telle ou telle
infrastructure. Les préfets pourront toujours soutenir qu'elles ne
remplissent pas les conditions.
Ainsi le gouvernement s'est-il attaqué avec efficacité, une fois
encore, aux modestes contre-pouvoirs que notre pays compte encore.
► Référence concernant l'arrêté du 12 juillet 2011 fixant les
modalités d'application au niveau national de la condition prévue au 1°
de l'article R. 141-21 du code de l'environnement concernant les
associations et fondations souhaitant participer au débat sur
l'environnement dans le cadre de certaines instance (JORF n°0161 du 13
juillet 2011, page 12 154).
auteur : Corinne LEPAGE
Ancienne ministre de l'Environnement, aujourd'hui avocate,
présidente de Cap21 et présidente du CRII-GEN et députée au Parlement
européen.
19 juillet 2011
sources : http://www.rue89.com/corinne-lepage/2011/07/19/les-assos-pour-lenvironnement-se-font-entuber-en-douce-214879