En Roumanie, les Indignés ont eu la tête du gouvernement
Le Point.fr - Publié le 07/02/2012 à 09:34 - Modifié le 07/02/2012 à 13:38, Par Mirel Bran
Ils n'ont pas cessé de protester contre la politique d'austérité et des conditions de vie qui ne se sont pas améliorées.
Manifestation à Bucarest contre le plan d'austérité du gouvernement, le 25 janvier 2012.
Les Indignés roumains viennent de remporter une première victoire en faisant tomber, lundi 6 février, le gouvernement de centre droit dirigé par le Premier ministre Emil Boc. Malgré le froid sibérien qui a envahi la Roumanie depuis la fin janvier, ils n'ont pas cédé. Les tas de neige qui se sont accumulés dans les rues de Bucarest, le blizzard, le gel et des températures qui sont descendues jusqu'à moins 32 degrés n'ont pas empêché les protestataires d'être tous les jours au rendez-vous.
Ils se rassemblent place de l'Université, dans le centre de Bucarest, pour protester contre la politique d'austérité imposée par le gouvernement d'Emil Boc. Peu d'entre eux ont entendu parler de l'appel du Français Stéphane Hessel - "Indignez-vous !" -, mais ils en sont l'illustration parfaite. "Qu'est-ce que ça veut dire la démocratie roumaine ? demande Stefan Dumbrava, professeur d'histoire à Bucarest. Le communisme est tombé depuis plus de vingt ans, mais notre vie ne s'est pas améliorée. Les hommes politiques n'ont cherché qu'à s'enrichir. Nous ne quitterons pas la rue tant que nous n'aurons pas obtenu des élections anticipées."
Mouvement spontané
Retraités en colère, étudiants déçus par un système d'enseignement précaire, infirmières exaspérées par le manque de moyens sont venus exprimer leur mécontentement sur la place publique. "Cela fait vingt ans que nous attendons de la classe politique un printemps démocratique, explique le jeune Claudiu Craciun, professeur la journée à l'École nationale de sciences politiques et, le soir venu, "indigné" place de l'Université. Si les hommes politiques continuent à ignorer le peuple, c'est le peuple qui le fera. Toute l'Europe de l'Est regarde vers Bucarest. Nous avons des amis en Bulgarie, en Hongrie, en Serbie qui se préparent à manifester comme nous."
Ce mouvement spontané qui s'est exprimé sur les réseaux internet traduit un malaise profond de la société roumaine. "Désolés, nous ne produisons pas autant que vous nous volez", "Élections anticipées", "À bas le gouvernement", sont les slogans que crient les manifestants, qui remettent en question l'ensemble de la classe politique roumaine dont ils exigent la relève.
Leur voix a été entendue et le Premier ministre Emil Boc a donné sa démission. Mis en place depuis 2008, son gouvernement a imposé une politique d'austérité qui s'est révélée insupportable pour la majorité de la population. Les fonctionnaires ont vu baisser leurs salaires de 25 % et la TVA a augmenté de 19 à 24 %, ce qui a freiné la consommation. Ces mesures drastiques sont le prix que la Roumanie a dû payer pour un emprunt de plus de 20 milliards d'euros obtenu en mars 2009 auprès du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale et de l'Union européenne (UE).
"Au moindre faux pas, nous sortirons de nouveau dans la rue"
L'opposition, qui résulte d'une alliance entre les socialistes et les libéraux, entend bien profiter des tensions qui secouent le pays pour exiger des élections anticipées. Lors de la soirée du lundi 6 février, après avoir consulté l'ensemble des partis politiques, le président centriste Traian Basescu a nommé un nouveau Premier ministre. Mihai Razvan-Ungureanu, 43 ans, chef des services de renseignements extérieurs depuis novembre 2007, a accepté de former le nouveau gouvernement. Ex-capitaine de vaisseau, le président roumain aime l'ordre et la discipline, qualités qui ne manquent pas au chef des renseignements. Le président Basescu a choisi un gouvernement dont les ministres appartiennent à son parti démocrate-libéral au pouvoir depuis son deuxième mandat, obtenu en 2008. Son principal objectif sera l'organisation des élections législatives qui auront lieu en novembre.
Cependant, l'opposition exige une solution plus radicale. Composée de socialistes et de libéraux, elle demande l'organisation d'élections anticipées afin de tirer profit du mouvement des Indignés et du mécontentement social de la population. "Nous sommes comme un bateau à la dérive sur une mer déchaînée, a déclaré le chef des socialistes Victor Ponta. Nous voulons des élections anticipées." Les socialistes entendent tirer un profit électoral du mouvement des Indignés, mais la partie n'est pas gagnée d'avance. "Qu'ils ne se fassent pas d'illusion ! a déclaré Stefan Dumbrava. Nous allons rester vigilants, et au moindre faux pas nous sortirons de nouveau dans la rue. C'est fini le temps où l'on décide de notre sort tous les quatre ans au moment des élections. À partir de maintenant, ce sera tous les jours."
Source: http://www.lepoint.fr/monde/en-roumanie-les-indignes-ont-eu-la-tete-du-gouvernement-07-02-2012-1428238_24.php
Le Point.fr - Publié le 07/02/2012 à 09:34 - Modifié le 07/02/2012 à 13:38, Par Mirel Bran
Ils n'ont pas cessé de protester contre la politique d'austérité et des conditions de vie qui ne se sont pas améliorées.
Manifestation à Bucarest contre le plan d'austérité du gouvernement, le 25 janvier 2012.
Les Indignés roumains viennent de remporter une première victoire en faisant tomber, lundi 6 février, le gouvernement de centre droit dirigé par le Premier ministre Emil Boc. Malgré le froid sibérien qui a envahi la Roumanie depuis la fin janvier, ils n'ont pas cédé. Les tas de neige qui se sont accumulés dans les rues de Bucarest, le blizzard, le gel et des températures qui sont descendues jusqu'à moins 32 degrés n'ont pas empêché les protestataires d'être tous les jours au rendez-vous.
Ils se rassemblent place de l'Université, dans le centre de Bucarest, pour protester contre la politique d'austérité imposée par le gouvernement d'Emil Boc. Peu d'entre eux ont entendu parler de l'appel du Français Stéphane Hessel - "Indignez-vous !" -, mais ils en sont l'illustration parfaite. "Qu'est-ce que ça veut dire la démocratie roumaine ? demande Stefan Dumbrava, professeur d'histoire à Bucarest. Le communisme est tombé depuis plus de vingt ans, mais notre vie ne s'est pas améliorée. Les hommes politiques n'ont cherché qu'à s'enrichir. Nous ne quitterons pas la rue tant que nous n'aurons pas obtenu des élections anticipées."
Mouvement spontané
Retraités en colère, étudiants déçus par un système d'enseignement précaire, infirmières exaspérées par le manque de moyens sont venus exprimer leur mécontentement sur la place publique. "Cela fait vingt ans que nous attendons de la classe politique un printemps démocratique, explique le jeune Claudiu Craciun, professeur la journée à l'École nationale de sciences politiques et, le soir venu, "indigné" place de l'Université. Si les hommes politiques continuent à ignorer le peuple, c'est le peuple qui le fera. Toute l'Europe de l'Est regarde vers Bucarest. Nous avons des amis en Bulgarie, en Hongrie, en Serbie qui se préparent à manifester comme nous."
Ce mouvement spontané qui s'est exprimé sur les réseaux internet traduit un malaise profond de la société roumaine. "Désolés, nous ne produisons pas autant que vous nous volez", "Élections anticipées", "À bas le gouvernement", sont les slogans que crient les manifestants, qui remettent en question l'ensemble de la classe politique roumaine dont ils exigent la relève.
Leur voix a été entendue et le Premier ministre Emil Boc a donné sa démission. Mis en place depuis 2008, son gouvernement a imposé une politique d'austérité qui s'est révélée insupportable pour la majorité de la population. Les fonctionnaires ont vu baisser leurs salaires de 25 % et la TVA a augmenté de 19 à 24 %, ce qui a freiné la consommation. Ces mesures drastiques sont le prix que la Roumanie a dû payer pour un emprunt de plus de 20 milliards d'euros obtenu en mars 2009 auprès du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale et de l'Union européenne (UE).
"Au moindre faux pas, nous sortirons de nouveau dans la rue"
L'opposition, qui résulte d'une alliance entre les socialistes et les libéraux, entend bien profiter des tensions qui secouent le pays pour exiger des élections anticipées. Lors de la soirée du lundi 6 février, après avoir consulté l'ensemble des partis politiques, le président centriste Traian Basescu a nommé un nouveau Premier ministre. Mihai Razvan-Ungureanu, 43 ans, chef des services de renseignements extérieurs depuis novembre 2007, a accepté de former le nouveau gouvernement. Ex-capitaine de vaisseau, le président roumain aime l'ordre et la discipline, qualités qui ne manquent pas au chef des renseignements. Le président Basescu a choisi un gouvernement dont les ministres appartiennent à son parti démocrate-libéral au pouvoir depuis son deuxième mandat, obtenu en 2008. Son principal objectif sera l'organisation des élections législatives qui auront lieu en novembre.
Cependant, l'opposition exige une solution plus radicale. Composée de socialistes et de libéraux, elle demande l'organisation d'élections anticipées afin de tirer profit du mouvement des Indignés et du mécontentement social de la population. "Nous sommes comme un bateau à la dérive sur une mer déchaînée, a déclaré le chef des socialistes Victor Ponta. Nous voulons des élections anticipées." Les socialistes entendent tirer un profit électoral du mouvement des Indignés, mais la partie n'est pas gagnée d'avance. "Qu'ils ne se fassent pas d'illusion ! a déclaré Stefan Dumbrava. Nous allons rester vigilants, et au moindre faux pas nous sortirons de nouveau dans la rue. C'est fini le temps où l'on décide de notre sort tous les quatre ans au moment des élections. À partir de maintenant, ce sera tous les jours."
Source: http://www.lepoint.fr/monde/en-roumanie-les-indignes-ont-eu-la-tete-du-gouvernement-07-02-2012-1428238_24.php