Quelques mots d’Étienne Chouard
- Publié le : dimanche 13 février
- Auteur(s) : Étienne Chouard
- Mots-clés : économie; politique
- Commentaires : 4
- (dernier : 17 février 01:40 par anonyme)
- Source : Étienne Chouard
Je serai heureux de rencontrer enfin certains d’entre vous qui suivez ici mon
travail depuis longtemps, ainsi que d’autres qui auront été simplement
attirés par les thèmes de réflexion annoncés.
J’ai demandé aux militants qui m’invitent si gentiment d’avoir du
temps et de la liberté pour échanger avec les auditeurs et pour étudier
soigneusement les objections qui ne manqueront pas de surgir, notamment à
propos du tirage au sort. Nous aurons donc l’après-midi. Je tâcherai de
décomposer mon propos en quelques courts exposés, pour permettre aux
réactions de s’exprimer au plus près des idées.
Pour l’instant, je prévois d’aborder les thèmes suivants (l’ordre de
cette première mouture est à revoir, il faut que je trouve un bon plan),
avec libre possibilité d’ouvrir les parenthèses que l’on voudra, au fur
et à mesure des échanges :
Conférence-débat sur quelques sujets fondateurs
dont les élus ne peuvent pas parler. Introduction : les élus ne peuvent pas débattre — et surtout pas
décider — sur ces sujets-là car ils ont, en l’occurrence, par
définition, un intérêt personnel contraire à l’intérêt général : ce
n’est pas aux élus et aux hommes de partis de régler les questions
institutionnelles car ils y sont mécaniquement en situation de conflit
d’intérêt, instituant alors des règles pour eux-mêmes, cause ensuite de
tous les abus de pouvoir.
À quoi sert une Constitution ?Sommes-nous personnellement concernés, dans notre vie quotidienne,
par la Constitution ? Que pourrions-nous gagner à une meilleure
Constitution ?
Quelles sont les institutions clefs d’une démocratie ?
L’exemple passionnant de la démocratie athénienne.Dans quel régime vivons-nous ? Ni démocratie, ni dictature : nous
sommes depuis longtemps dans une redoutable oligarchie (dans une
variante ploutocratique). Redoutable parce que ce genre de régime
déclenche sans arrêt des guerres un peu partout pour survivre aux
résistances.
L’importance des mots pour désigner (ou pas) l’ennemi : stratégie de
la novlangue où les mots des résistants sont ridiculisés, salis, et
finalement criminalisés et interdits. Par exemple, le concept même de
complot : si le mot est discrédité en l’associant systématiquement à la
maladie mentale de la paranoïa, tous les dénonciateurs d’éventuels
complots bien réels sont facilement discrédités, et donc désarmés. C’est
très malin. Autre exemple : ne nous laisser que les mots démocratie et
dictature pour caractériser un régime, sans jamais parler d’oligarchie,
ni de cleptocratie, ni de ploutocratie, c’est nous conduire à croire que
nous vivons en démocratie à partir du constat de l’évidence que nous ne
sommes pas en dictature. C’est très malin. Il y a d’autres exemples,
comme réduire la gauche à l’antiracisme en négligeant la justice
économique et sociale... Nous en parlerons ensemble, je suis sûr que
vous avez des idées là-dessus.
Les auteurs du gouvernement représentatif (c’est le nom de nos
régimes actuels, partout dans le monde) voulaient-ils, en 1789,
instituer une démocratie, ou voulaient-ils au contraire, explicitement,
l’éviter à tout prix ? Pourquoi avons-nous oublié cela ?
Comment le Peuple peut-il, concrètement, reprendre (et garder) le contrôle de ses représentants ?
Élection ou tirage au sort ?Alors que, toujours et partout, l’élection permet aux riches
d’acheter le pouvoir politique, le tirage au sort a permis (pendant 200
ans à Athènes, il y a 2 500 ans) — et permettrait encore — de
désynchroniser le pouvoir économique du pouvoir politique. Relisez bien,
ceci est absolument essentiel.
Vices de l’élection, essentiellement aristocratique : corruptible et corruptrice, elle pousse au mensonge ;
et vertus du tirage au sort, essentiellement démocratique : incorruptible et impartial, il ne déshonore pas les perdants.
Besoin sociétal vital d’un processus constituant désintéressé.
Qu’est-ce qu’un conflit d’intérêt ? Préférez-vous un représentant compétent ou honnête ?
Qui est compétent pour écrire une Constitution ? Qui est légitime ?Et si le sort vous désignait vous, pour participer à une Assemblée constituante ? Impossible ? Souhaitable ?
Ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir :
ce n’est pas aux Présidents, aux Ministres, aux Parlementaires, aux
Juges ni même aux hommes de Partis (autant d’hommes se destinant au
pouvoir), d’écrire, de modifier ou de protéger la Constitution.
L’exemple accablant des institutions européennes, point méconnu par point méconnu.
Le point particulier de la création monétaire.
Comment fonctionne la monnaie-dette ?L’exemple révoltant de la prétendue "Réserve fédérale" américaine.
Les alternatives monétaires. Monnaie permanente, monnaie fondante
(pour dissuader de l’accumuler parce que ça en prive les autres).
La guerre permanente, centrale, entre travailleurs et rentiers. Et le
choix politique qui en découle DIRECTEMENT, entre chômage et inflation.
Le lien entre souveraineté monétaire et souveraineté politique.
Le rôle de la Constitution dans l’exercice réel de la souveraineté. À qui obéissent les forces armées ?
Faut-il vraiment, comme l’analysait Marx, changer le rapport de force
avant de changer le droit,
ou bien un changement initial de procédure d’élaboration du droit
changera-t-il mécaniquement le rapport de force (en empêchant les riches
de tricher avec l’intérêt général en achetant le pouvoir politique) ?
Que peut-on redouter du tirage au sort des constituants ? Quelles
sont les institutions correctrices connues ou imaginables pour améliorer
encore la fiabilité du tirage au sort ? Que peut-on espérer du tirage
au sort des constituants ? Y a-t-il déjà eu des expérience réelles ?
Comment cela s’est-il passé ?
Tirage au sort partiel ?Une assemblée élue (la Chambre des Partis, élite professionnelle de
la politique, choisie pour ses vertus) ET une assemblée tirée au sort
(la Chambre des Citoyens, représentative de la diversité réelle du
pays) ?
Et le meilleur pour la fin...
)
L’institution centrale du référendum d’initiative citoyenne (RIC).Le RIC était ardemment défendu par Condorcet et fut curieusement oublié par tous ses successeurs (élus).
Modalités et expériences de RIC à connaître. L’exemple encourageant du peuple suisse (populiste =démocratique ?)
----------------------------------------------Conclusion, synthèse :Donc, pour moi, ce qui est central, ce qui est décisif, ce qui est
méconnu, c’est que le peuple lui-même, à la base, sans compter sur les
politiciens de métier (qui ne soutiendront jamais une idée qui va les
mettre à leur tour au chômage), comprenne la priorité absolue du TIRAGE
AU SORT pour s’affranchir durablement de la corruption des RICHES :
j’observe en effet que, toujours et partout, l’élection permet aux
riches d’acheter le pouvoir politique et nous conduit donc fatalement
(il n’y a pas d’exception, nulle part) à l’oligarchie, à la rareté
voulue et entretenue (et d’ailleurs aux racismes et aux haines, toujours
exacerbés en période de pénurie) et à la guerre, en synchronisant le
pouvoir économique et le pouvoir politique.
Et le fait, pour les plus riches, d’avoir, en plus de leur immense
richesse préalable, pris le contrôle de la création monétaire elle-même,
les rend encore plus effroyablement riches et encore plus capables de
corrompre facilement n’importe qui, à commencer par les élus, et presque
tous les candidats à l’élection. Tout se tient, pour l’instant, dans un
cercle vicieux où l’élection permet à la boucle de se boucler en
prêtant le flanc (et même en incitant) à la corruption.
À Athènes, il y a 2500 ans, pendant 200 ans (c’est très long), le
tirage au sort a permis — mécaniquement, automatiquement — de
désynchroniser durablement le pouvoir économique et le pouvoir
politique : les pauvres, nombreux, avaient forcément le pouvoir et les
riches, peu nombreux, ne pouvaient jamais l’avoir (ce qui mettait les
riches philosophes en colère, d’ailleurs). C’est alors un cercle
vertueux qui pousse à la vertu (par des contrôles et des sanctions) et
gêne la corruption au lieu de la favoriser.
Ma spécificité, c’est d’envisager les alternatives monétaires par la
voie des institutions, et plus précisément par la voir d’un processus
constituant enfin désintéressé : la première démocratie au monde sera
instituée par une Assemblée constituante tirée au sort, qui prévoira à
coup sûr la garantie que la monnaie ne peut être créée que par la
puissance publique et sous contrôle citoyen.
SOURCES : http://www.egaliteetreconciliation.fr/Quelques-mots-d-Etienne-Chouard-5450.html